Gabon : 40 ans de dépendance alimentaire envers l’étranger
Après 55 ans d’indépendance, la production agricole du Gabon couvre moins de 20% des besoins nationaux. Le secteur agricole qui représentait encore 44% du PIB en 1963, et assurait aux populations l’autosuffisance alimentaire, ne représentait plus que 3.6% de la richesse nationale en 2014. Le Gabon est ainsi passé du statut d’exportateur net de produits alimentaires à celui d’importateur structurel. Ce constat traduit l’échec des politiques agricoles menées par les gouvernements successifs.
L’analyse des stratégies agricoles déployées par les autorités gabonaises au cours des 5 dernières années laissent apparaitre des incohérences, des objectifs de productions annoncés mais jamais atteints et surtout une absence de coordination entre les programmes. Dernier programme en cours de mise en œuvre, le projet GRAINE est encore trop récent pour que nous réalisions ici un bilan. Cependant, nous dresserons un tableau de ce projet, de ses objectifs et des moyens qui lui sont attribués.
Respecter les engagements de Maputo pour atteindre l’autosuffisance alimentaire
En 2003 à Maputo (Mozambique), le Gabon à l’instar d’autres pays africains s’engageait à consacrer 10% des ressources publiques au financement de l’agriculture pour ainsi parvenir à atteindre l’autosuffisance alimentaire. 12 ans après avoir pris cet engagement, le Gabon tarde à le traduire dans les faits.
En effet, en 2013 l’agriculture n’arrivait qu’en 23e position en termes d’affectation des ressources publiques et ne représentait que 0.44% du budget national. Entre 2003 et 2013 les ressources budgétaires consacrées au secteur n’ont quasiment pas évolué en proportion du budget général de l’Etat. Avec un si faible niveau de ressources affectées au secteur agricole, il n’est pas possible d’atteindre l’autosuffisance alimentaire dont le pays a besoin. A l’analyse, l’échec des programmes agricoles successifs lancés par les gouvernements s’explique en partie par la faiblesse des financements qui leur ont été affectés.
Le PRODIAG, un programme qui n’a pas atteint ses objectifs
Créé en 1992 l’institut Gabonais d’Appui au Développement (IGAD) est en charge de favoriser la création d’espaces agricoles autour des grands centres urbains. En dépit de l’appui des compagnies pétrolières et du financement de bailleurs internationaux comme l’Agence française de développement (AFD) l’agriculture périurbaine gabonaise demeure symbolique.
Ainsi, le Projet de Développement et d’Investissement Agricole au Gabon (PRODIAG), principal projet en cours de l’IGAD, est loin d’avoir atteint l’objectif qui lui était assigné. Lancé en 2011 et financé à hauteur de 13 milliards FCFA, le PRODIAG était sens ramener à 56% le ratio qui mesure le volume des importations des denrées alimentaires au Gabon dès 2016. Cependant, à quelques mois de l’échéance, une note de l’Oxford Business Group datée de janvier 2015, confirme que le Gabon continue d’importer 80% de ce qu’il consomme.
Le développement d’un tissu agricole peri-urbain doit être structurant dans la définition d’une stratégie de réduction de la dépendance alimentaire dans un pays où la majorité de la population est citadine comme le Gabon. Alors que le PRODIAG annonçait vouloir créer 1090 unités de productions susceptibles de produire 13 600 tonnes d’aliments et ainsi créer 3 000 emplois sur la période 2011-2016, on peut s’étonner que seuls 13 milliards FCFA sont affectés au projet dont seulement 2.6 milliards provenant de ressources nationales. Par ailleurs, il faut déplorer que les actions de l’IGAD en général et du PRODIAG en particulier soient décorrelées des autres programmes agricoles du gouvernement, notamment le programme de construction de fermes agropastorales et le projet Graine.
Le projet de construction des fermes agropastorales à l’abandon
Prévu dans le cadre d’une convention signée en avril 2011 entre le gouvernement gabonais et la société israélienne LR Group, le projet prévoyait la construction de 10 fermes reparties sur le territoire national. Sensées produire des légumes et des volailles, le coût de construction de ces fermes fut évalué à 9.5 milliards FCFA. Par ailleurs, le gouvernement affirmait qu’en mars 2014 l’ensemble des fermes prévues dans le projet seraient construites. Les autorités annonçaient également qu’elles parviendraient à stopper l’importation des légumes et des volailles en 1 an.
4 ans après cette annonce, la viande de volaille demeure le 2e poste d’importation alimentaire au Gabon devant les produits oléagineux. L’ensemble des fermes prévues n’a pas été construit et la ferme pilote érigée dans la province de l’Estuaire tombe en désuétude. En clair, l’opérateur technique israélien LR Group s’est progressivement désengagé du projet reprochant à l’Etat gabonais de ne pas avoir honorer ses engagements financiers.
Au moment où le programme de construction des fermes agropastorales attendait un soutien du gouvernement, les autorités gabonaises ont préféré lancer un autre programme, le projet GRAINE (Gabonaise des Réalisations Agricoles et des Initiatives des Nationaux Engagés), lui aussi sans lien avec le précédent projet dont on a toujours pas décliné le bilan.
GRAINE : une nouvelle promesse pour réduire la dépendance alimentaire
Contrairement à son voisin le Cameroun dont l’excédent de production agricole est écoulé dans la sous-région d’Afrique centrale, le Gabon a accumulé un retard dans le secteur agricole. Le pays consacre 250 à 300 milliards FCFA à l’importation des denrées alimentaires. Alors que le PRODIAG et le programme des fermes agropastorales n’ont pas à ce jour produit les résultats escomptés, le gouvernement gabonais pense pouvoir résoudre le problème de la dépendance alimentaire au travers d’un nouveau programme dénommé GRAINE.
Démarré le 22 décembre 2014, le Programme GRAINE vise à atteindre l’autosuffisance alimentaire en même temps qu’on offre à de nombreux chômeurs un emploi stable et pérenne. Ce programme comme ses prédécesseurs aurait vocation à favoriser la réduction de la pauvreté, l’amélioration de la sécurité alimentaire et la diversification de l’économie gabonaise.
À ce jour le programme GRAINE est en phase de déploiement uniquement dans 2 provinces (Ogooué-Ivindo et Woleu-Ntem) sur les 9 que compte le pays. Dans la province du Woleu-Ntem, les équipes en charge du projet disent avoir mis en exploitation près de 4 000 de terres agricoles qui seraient exploités par 95 associations et coopératives.
Alex SAIZONOU & Mays MOUISSI
3 réponses
[…] Après 55 ans d’indépendance, la production agricole du Gabon couvre moins de 20% des besoins nationaux. Le secteur agricole qui représentait encore 44% du PIB en 1963, et assurait aux populations l’autosuffisance alimentaire, ne représentait plus que 3.6% de la richesse nationale en 2014. […]
[…] le même destin que le programme de construction des fermes agropastorales lancé en avril 2011. En mars 2014, le gouvernement affirmait que grâce aux fermes agropastorales il parviendrait à stop…. Manifestement c’est un […]
[…] le même destin que le programme de construction des fermes agropastorales lancé en avril 2011. En mars 2014, le gouvernement affirmait que grâce aux fermes agropastorales il parviendrait à stop…. Manifestement c’est un […]